3 août 2010

Le Rivage des Syrtes

      Je lis Le Rivage des Syrtes. Ce n’est pas là la littérature que je préfère, ou plutôt cela ne correspond pas à la conception que je me fais de ce que devrait être la littérature Le style parfait, pour moi, ne doit présenter aucun apport par rapport à la pensée : il est l’expression la plus juste et la plus concise possible de ce que l’on à a dire. C’est en cela que réside son harmonie, et en rien de plus. Le style de Gracq, lui, apporte quelque chose de plus. Le texte affiche ostensiblement son caractère littéraire. L’idée n’est plus pure, il s’y ajoute de la matière.
       Et certes, c’est sans doute moi qui ai tort : c’est sans doute la matérialité des mots, leur choix en fonction de cette matérialité, qui confère à un texte une qualité spécifiquement littéraire. C’est en cela que Flaubert, Hugo, Mallarmé font de la littérature. Mais j’ai une vision plus archaïque des choses, celle des époques (le dix-huitième siècle de Voltaire entre autres) où la distinction entre le message et l’expression n’était pas encore faite, ou, plus exactement, où l’expression était totalement subordonnée au message. Gracq, au bout de quelques pages, m’ennuie et me tombe des mains. Je ne suis pas insensible à son travail stylistique, je le distingue, il agit sur moi lors de la lecture, – mais tout cela ne me cause aucun plaisir, je n’arrive pas à en nourrir mon appétit littéraire.
       Je touche sans doute là du doigt la nature de la distinction entre les « classiques » et les – disons – « avant-gardistes ». Les avant-gardistes cherchent sans cesse à renouveler le langage, à lui imposer leur empreinte, tandis que les classiques tendent à faire oublier le langage, qui se dissout dans un parfaite adéquation avec ce qu’il veut exprimer.

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