Lu Central Park, de Guillaume Musso. C’est le troisième roman de cet auteur que je lis, quelque chose me pousse toujours à y revenir en été. Ce qu’il y a de fascinant chez Guillaume Musso, c’est la pureté absolue de sa vision du monde. Il n’est encombré par aucun idéal, par aucune considération d’ordre moral, social ou métaphysique. Son univers est régi par des lois primaires, seuls les plaisirs des sens émergent à la surface de la vie et lui donnent sa signification. C’est le moins ascète des romanciers. Il suffit d’ailleurs de noter les emplois exercés par ses personnages masculins pour avoir une idée des préoccupations fondamentales de cet auteur : ceux-ci sont cuisinier (L’Appel de l’ange), gynécologue (Central Park), etc. Quand on lit un livre de Guillaume Musso, tout devient plus simple, on n’a qu’une envie : s’installer à la terrasse d’un café de Manhattan ou de San Francisco, déguster des « huîtres et des langoustines » (mais en aucune façon les « graines pour oiseau » ou le « quinoa dégueulasse » des végétariens), boire des « Bacari Mojitos », des « Bombay tonics » ou des « Château-Margaux 2000 », manger des « cheesecakes » ou des gâteaux au chocolat de « Pierre Hermé » avant de surfer sans fin sur son « smartphone » ou de peloter des « fesses rebondies »… Par contre, on se sent pris d’une haine et d’un dégoût infinis pour les pauvres, les « drogués », les « prostituées », les vieux, les malades « bouffant de la compote les yeux dans le vague », etc., on a juste envie que tous ces gens indésirables cessent d’exister et de nous empêcher de profiter comme il se doit des couchers de soleil sur la baie californienne.
Je crois que ce qui peut expliquer le succès de Guillaume Musso, c’est qu’il est merveilleusement représentatif de la mentalité de notre époque, une époque où la conscience politique n’existe pas et où, pour se consoler d’avoir laissé élire sans réagir un psychopathe et un demeuré, on accompagne le déclin inexorable en buvant des cocktails et en surfant ad nauseam sur son « smartphone ». Mais l’antique Justice Divine veille, et les soubresauts actuels indiquent que ce moment fangeux touche à sa fin, que l’ère des nihilistes jouisseurs s’achève, et que le grand Renouveau séculaire approche enfin.