17 avril 2015

La voie du Ciel ou le véritable sens de l'existence


       
       Dans les récits policiers, l’explication de l’énigme est souvent fournie par un élément tellement évident, tellement en vue, que l’on n'y faisait même plus attention. Et s’il en était de même en ce qui concerne la signification de l’existence ? Si l’explication du sens de la vie – et de la mort – était fournie par ce qu’il y a de plus évident, de plus visible, à savoir la position de l’astre lumineux au moment du décès ? C’est là la dernière chose dont les défunts ont conscience avant de mourir, et cet élément n’est peut-être pas si anodin que ça. Creusons un peu cette intuition, et étudions, de manière systématique, la saison de l’année au cours de laquelle les hommes et femmes célèbres sont morts.

       Du 21 décembre au 20 mars : saison des ténèbres dominantes et de la lumière croissante. 


       Cette époque est la date de décès des grands philosophes rationalistes, comme Descartes (11 février), Spinoza (21 février), Kant (12 février). C’est l’époque où la pleine lumière de la vérité ne brille pas encore, mais où l’on s’achemine vers elle. Les êtres raisonnables, disciplinés, maîtres d’eux-mêmes, un peu sceptiques, ont tendance à mourir en cette saison, comme Montesquieu (10 février), André Gide (19 février), François Mitterrand (8 janvier), etc. 


       Du 21 mars au 20 juin : saison de la lumière dominante et de la lumière croissante.


       C’est la Voie Royale. C’est l’époque à laquelle meurent les êtres pleinement réalisés spirituellement. En cette saison sont morts Bouddha (mois de mai), Platon (mois de mai), Jésus Christ (mois d’avril), Mahomet (8 juin), les papes canonisés par l’Église catholique comme Pie V (1er mai), Jean XXIII (3 juin), Jean-Paul II (2 avril), mais aussi Bossuet (12 avril), Voltaire (30 mai), Victor Hugo (22 mai), etc. 


       Du 21 juin au 20 septembre : saison de la lumière dominante et des ténèbres croissantes.


       C’est l’époque où la lumière, encore dominante, est peu à peu gagnée par le poids de la matière. En cette saison sont morts des êtres qui, bien qu’animés d’un idéal ardent, se sont quelque peu laissés gagner par les tourments de la sensibilité, voire par une certaine mélancolie. Rousseau (2 juillet) est un cas particulièrement représentatif, mais l’on pourrait également citer Chateaubriand (4 juillet) ou Alfred de Vigny (17 septembre). C’est également la date à laquelle disparaissent ceux qui, tout en ayant une conscience parfaitement nette des réalités spirituelles et religieuses, ont manifesté une certaine révolte à l’égard de celles-ci, comme Baudelaire (31 août), Nietzsche (25 août), Hermann Hesse (9 août). Beaucoup de stars de la musique et du cinéma meurent aussi en cette saison, et s’en vont avec la lumière, comme Michael Jackson (25 juin), Fred Astaire (22 juin), Marlon Brando (1er juillet), Marilyn Monroe (5 août), Katharine Hepburn (29 juin), Ingrid Bergman (29 août), etc. 


       Du 21 septembre au 20 décembre : saison des ténèbres dominantes et des ténèbres croissantes.


       C’est la voie obscure. C’est la saison de décès des satanistes comme Aleister Crowley (1er décembre), Anton LaVey (29 octobre), des écrivains qui ont ouvertement prôné le mal comme Sade (2 décembre), Lautréamont (24 novembre), de ceux qui ont accordé une place démesurée et criminelle à la sexualité comme Gilles de Rais (26 octobre), Jimmy Savile (29 octobre), etc. C’est également la saison à laquelle meurent beaucoup d’hommes politiques, la politique étant le pôle opposé à celui de la spiritualité : Napoléon (5 mai dans l’hémisphère sud), de Gaulle (9 novembre), Kennedy (22 novembre), etc.


       On le voit, les résultats de cette enquête sont éloquents. Après avoir passé en revue les dates de décès de centaines de personnalités, écrivains, acteurs, hommes politiques, mystiques, criminels, etc., force est de constater que chaque date fournit un témoignage sur l’état de réalisation spirituelle de l’individu en question. Il y a là quelque chose véritablement confondant.
       Ainsi, en ce début de printemps de l’année 2015, c'est donc le secret du sens de l’existence qui a été élucidé.
       Résumons-nous. Le moment fondamental de toute vie n’est pas la naissance, mais bien la mort, comme le professaient toutes les civilisations anciennes et toutes les traditions spirituelles. Au moment de la mort, deux voies s’ouvrent à l’être : l’une vers la lumière et la vie, l’autre vers les ténèbres et l’oubli. C’est le comportement durant l’existence qui détermine la voie qui est alors empruntée.
       Pourtant, si désormais plus rien ne reste à accomplir sur le plan de la connaissance, c’est peut-être la partie la plus difficile du chemin qui se dresse devant nous. Pour emprunter la voie lumineuse, il faut ressentir au fond de son être la présence divine, et mettre en œuvre de nombreuses vertus, au premier rang desquelles le détachement, ainsi que la justice et la foi. C’est à ce prix seulement qu’il sera donné à chacun de pouvoir emprunter ce que les taoïstes nommaient la voie du Ciel.

12 commentaires:

  1. Éh bien, cher Laconique, non seulement vous êtes très prolifique en ce moment, mais en plus vous faites dans l'originalité : le sujet de votre article est surprenant et aborde un sujet auquel vous ne nous aviez pas habitués. Ainsi, "en ce début de printemps de l’année 2015", vous vous faites en quelque sorte astrologue et j'ai bien envie de vous appeler Madame Soleil ou alors Elizabeth Tessier, à condition évidemment d'imaginer qu'une grosse paire de couilles poilues comme la votre pend entre les jambes de ces deux charmantes dames. Dites donc, quelle ambition vous manifestez-là ! Vous vous targuez d'avoir "élucidé" rien moins que "le secret du sens de l’existence" ! Putain, cher Laconique vous envoyez du lourd, merde. Et excusez ma grossièreté, cher Laconique, mais elle est de mise quand vous trouez le cul de vos innombrables lecteurs.

    Ma foi, vous étayez bien votre thèse, ça se tient tout ça : il se pourrait que les astres aient une influence physique sur nous, sur notre naissance et notre mort, ça choque pas ma raison, puis y a tellement de trucs qui nous échappent dans cet univers que ce serait bien présomptueux de ma part de prétendre en connaître les tenants et aboutissants.

    Cependant, on pourrait vous faire le reproche, concernant le choix d'hommes et femmes célèbres qui ont claqué, d'arranger un peu cette affaire comme bon vous semble dans le but d'appuyer ce que vous dites. C'est un peu orienté comme démonstration ! Je parierais qu'on peut citer plein d'autres macchabées qui on tiré leur révérence à des dates contredisant vos brillantes révélations. Je ne suis donc pas totalement "confondu", cher et puissant Laconique !

    Et pour ce qui est de la fin de votre article, cher Laconique, dites-moi, vous vous faites bigot en prenant de l'âge ? Je veux imaginer que cette "présence divine" dont vous parlez est une métaphore pour désigner une entité noble que je vous laisse, dans ce cas, expliciter davantage.

    Bon, vous l'avez compris, cher Laconique, même si je vous trouve brillant comme toujours, vous êtes sur ce coup-là pour moi trop mystique ! Que voulez-vous, c'est triste, mais il est trop vieux, trop blasé, ce Marginal Magnifique, pour croire encore au ciel...

    RépondreSupprimer
  2. Oui, j’ai été ambitieux sur ce coup-là, cher Marginal, je me suis dit qu’il était temps de résoudre une bonne fois pour toutes le mystère de l’existence. Bon, il y a un peu de second degré aussi, mais comme vous le dites beaucoup de choses nous échappent, et puisque les saisons ont une telle influence sur notre comportement (ce n’est pas à un expert comme vous que je vais apprendre le nombre de nos congénères qui se changent en véritables faunes au printemps !), il n’est pas absurde de penser qu’elles en ont une également sur notre mort. Je me méfie quand même un peu de l’astrologie (et il n’y a pas que mes attributs virils qui me distinguent d’Elisabeth Tessier), mais on est forcé de reconnaître que l’astrologie est la plus ancienne des sciences cultivées par l’humanité, et qu’il doit y avoir un certain fond de vérité derrière tout ça…

    D’une manière générale, il me semble que tout ce qui concerne la mort est riche d’enseignements. Je me rappelle avoir lu avec beaucoup d’intérêt les dernières déclarations de condamnés à mort, et c’est très instructif sur la nature humaine, le rapport à l’au-delà, etc. Et en comparant les dates de décès d’hommes célèbres, je me suis rendu compte qu’il y avait une véritable cohérence là-dedans. Mais on ne vous la fait pas, cher Marginal, et il est vrai que certains cas sont plus parlants que d’autres, et que j’ai un peu orienté les exemples pour cet article. Mais pas énormément, je vous assure, dans l’ensemble ça suit très bien le schéma que j’ai esquissé.

    Je sais que le Marginal Magnifique est un agnostique déclaré. J’espère ne pas être « bigot » pour ma part, mais il me semble que la pensée gagne à s’élever, dans sa course, au-dessus de la sphère sensible, et qu’y a-t-il au-delà, sinon le divin ? C’est là le message de Platon comme de Victor Hugo… Et quand à ressentir la présence divine au fond de nous, ça renvoie à des concepts de la philosophie hindoue, qu’il serait un peu oiseux de creuser ici. Allons, cher Marginal, vous n’êtes ni trop vieux ni trop blasé, malgré vos orgies que je ne veux même pas imaginer. Vous avez un regard lucide sur le monde, mais la nostalgie de l’idéal est présente au fond de vous, tous vos fans le savent bien !

    RépondreSupprimer
  3. C’est un très beau billet que vous nous offrez là, cher Laconique ! Et comme le dit bien Le Marginal Laconique « vous envoyez du lourd » ! ;)

    Le sens de l’existence, rien de moins ! Ou plutôt, une sorte de mesure des défunts d’après la fin du parcours, un tableau des scores à l’échelle cosmique. C’est joli, c’est (presque) cohérent, on aurait envie d’y croire…

    Mais (cet éternel empêcheur de tourner en rond)…je pense aussi que vos exemples sont un peu trop bien choisis (sauf un, j’y reviendrai). Tenez, je vais essayer de prendre en défaut votre grille astrale avec quelques figures emblématiques qui me viennent à l’esprit…

    Pour Gandhi (mort un 30 janvier) et Albert Camus (4 janvier) ça fonctionne assez bien…pour Antoine de Saint-Exupéry, dont la quête de spiritualité à tragiquement pris fin un 31 juillet, et pour Jean Jaurès, assassiné un 3 septembre, ça peut aller aussi…Hum, je vais trouver…

    Léon Bloy était un homme à la spiritualité tourmentée…mort un 3 septembre lui aussi, ça passe. Hmm…

    Peut-on dire d’un Renzo Novatore
    (assassiné un 29 novembre) qu’il fait partie des êtres du côté obscur ? Je trouve ça un peu excessif… Et quid de Néron, que la tradition tient pour fou, mort un 9 ou un 11 juin (il est vrai que la date est incertaine mais tout de même) ? Ha j’oubliais, c’est un homme politique, ça peut aller dans ce cas.

    Je chipote, mais force est de reconnaître que votre système tient globalement la route, cher Laconique. Toutes mes félicitations pour ce coup de génie !

    Par contre je m’insurge catégoriquement contre l’inclusion de Voltaire dans la catégorie des êtres réalisés spirituellement, astre solaire ou pas. Je vous rappelle qu’il a essayé de trucider J. J. Rousseau ! Sans parler de ses écrits sur Jeanne d’Arc, qui sont infâmes. Non, force est de constater que Voltaire, être mesquin et bas, n’a pas su remplacer son irréligion militante par une grande morale, ce qui lui vaudra les foudres de Baudelaire, parmi d’autres (j’en parlerais un de ces jours).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il s'est fait attendre, mais il est de retour le sanglier burné ! Et bien entendu il ne démérite pas...

      Et j'oubliais de dire dans mon commentaire, cher Laconique, qu'on ressent l'influence de vos dernière lecture dans ce que vous nous avez proposé là.

      Supprimer
    2. Ma foi, cher Marginal, je ne saurais nier que la lecture de Guénon a un peu orienté mes pensées dans cette direction. Mais ça fait bien longtemps que cette théorie me trotte dans la tête. Je me souviens notamment y avoir pensé lors du décès de Nelson Mandela, mort le 5 décembre 2013 dans l’hémisphère sud, ce qui correspond au 5 juin de l’hémisphère nord. Et je peux ainsi vous annoncer que notre précédent président de la République mourra au mois de novembre. Rappelez-vous mes paroles !

      Supprimer
    3. *vos dernièreS lectureS

      J'avais mal de laisser une horreur pareille ici, cher Laconique !

      Supprimer
  4. Hé bien, je vous sais un gré infini, cher Johnathan Razorback, d’avoir pris au sérieux cette théorie. Je l’ai proférée sans la moindre ironie, elle est vérifiée par des dizaines d’autres noms que je n’ai pas cités ici pour ne pas être trop lourd, et, très modestement, je crois en effet avoir mis le doigt sur quelque chose de sérieux. Pour être encore plus modeste, j’ajouterai que je suis loin d’être le premier à la formuler (qui peut se vanter de trouver quelque chose de neuf ?), et qu’on en trouve l’expression métaphorique dans de nombreux textes sacrés (la Bible, la Bhagavad-Gîtâ, VIII, 24-26 : « Ce sont les deux voies éternelles, l’une claire, l’autre obscure, de l’univers », etc.) Mais franchement ça fonctionne, et les exemples que vous avez cherchés par vous-mêmes l’illustrent bien en effet (les cas d’Albert Camus ou de Léon Bloy collent parfaitement).

    Après, il y a bien sûr le risque d’interpréter à rebours la signification d’une vie en partant de sa date de décès. A partir d’une hypothèse initiale, on peut tout prouver, et il est vrai que chaque vie peut-être lue de diverses manières. Il est aisé alors de choisir celle qui nous convient. C’est ainsi qu’on pourrait avancer que Néron, malgré ses turpitudes, était animé d’une quête fervente de spiritualité, que c’était un amoureux de l’art et de la Grèce, qu’il a fait élever uns statue colossale en or de lui-même à l’endroit du futur Colisée (qui tire d’ailleurs son nom de là), etc. Bon, là c’est un peu tiré par les cheveux, je vous l’accorde ! On pourrait avancer qu’Hitler, officiellement mort un 30 avril, est en réalité mort à 95 ans au Brésil. Pour Renzo Novatore, j’aurais en revanche moins de mal à justifier ma théorie : il a violemment attaqué le christianisme, fait l’éloge des pulsions païennes, ce qui est exactement la position satanique, ceci dit sans rien vouloir ôter à son talent et à la vigueur de sa pensée.

    Je reviens un peu pour finir sur le cas de Voltaire. Inutile de dire que je ne porte pas du tout sur lui la même appréciation que vous. Pour moi, c’est d’abord le plus grand prosateur français. Et au point de vue « spirituel » (qui est le seul sur lequel se place cet article je vous le rappelle), il avait un véritable rapport avec l’idée de Dieu, dont il parle dans tous ses écrits, son œuvre se finissant d’ailleurs sur le superbe Dialogue de Sophronime et Adelos, dont je vous cite les dernières lignes : « O Dieu ! je n’ai jamais accusé votre providence. (…) Vous voulez que je sorte de ce spectacle magnifique, j’en sors ; et je vous rends mille très humbles grâces de ce que vous avez daigné m’y admettre pour me faire voir tous vos ouvrages, et pour étaler à mes yeux l’ordre avec lequel vous gouvernez cet univers. »

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. « Renzo Novatore […] a violemment attaqué le christianisme, fait l’éloge des pulsions païennes, ce qui est exactement la position satanique »

      En parlant de satanisme, Anton LaVey, que vous citez dans votre billet, a apporté quelques explications intéressantes sur les rapports entre cette espèce de religion antichrétienne et le paganisme. Dans La Bible Satanique (qui n’est pas inintéressante, si on peut supporter une formulation de l’individualisme en termes pseudo-religieux), il affirme que le diable est tout simplement le vieux dieu Pan, que les chrétiens du Moyen-âge ont recyclé comme incarnation du mal sur terre. Il associe le processus à une délégitimation générale des fêtes paysannes païennes qui étaient trop « extatiques » pour l’ethos monastique naissant. C’est assez crédible…Maintenant je me demande comment cette invention du diable peut coller avec l’histoire de Lucifer, ange déchu par Dieu, censé être beau et non pas grotesque et bestial (cf Le Génie du Mal de Guillaume Geefs)…

      « O Dieu ! je n’ai jamais accusé votre providence. »

      Je ne sais pas si Voltaire est un reconverti de la dernière minute, ou si, plus probablement, il ironise. Mais la seconde explication colle mieux aux faits. Voltaire s’est en effet rendu célèbre en argumentant contre l’idée d’une Providence divine à l’œuvre dans l’histoire, à partir de l’exemple du terrible tremblement de terre de Lisbonne de 1755 , survenu pendant la fête catholique de la Toussaint. Il soutenait que la catastrophe, de par sa date et son caractère absolument injuste, démontrait l’inexistence d’un Dieu bon et omnipotent.

      Après, si votre calendrier ne nous renseigne que sur la situation spirituelle du défunt à sa mort, et si Voltaire s’est amendé… Mais j’en doute considérablement. Ce n’est pas un hasard si Nietzsche a rendu hommage à ce pourfendeur du christianisme…

      Supprimer
    2. Je ne connaissais que de nom l’œuvre d’Anton LaVey, et je vous avoue que ma curiosité ne va pas au-delà. C’est sans doute intéressant aux points de vue intellectuel et esthétique, mais si vous voulez connaître le fond de ma pensée, tout ce galimatias sataniste est un véritable poison pour l’âme, une apologie des instincts les plus vils et les plus dévoyés sous couvert de pensée subversive. Je sais qu’en matière de morale, depuis mai 68, la subversion est devenue la norme, et que c’est ma position qui est désormais atypique. Mais, je le répète, si de telles théories sont stimulantes et excitantes, sur le long terme elles ne mènent à rien celui qui y adhère, sinon à la confusion et à la perdition.

      Pour Voltaire, vous commettez une grave erreur, si je puis me permettre, si vous voyez de l’ironie ou l’effet d’une conversion de la dernière heure dans l’extrait que j’ai cité. Ces lignes reflètent au contraire la position de toute une vie. Puisque vous faites allusion au tremblement de terre de Lisbonne, je vous invite à lire le Poème sur le désastre de Lisbonne, vous verrez que la position de Voltaire est bien plus nuancée que ce que vous dites, et qu’il termine par une déclaration de soumission à la Providence qui rejoint exactement le passage que je cite. Ce que Voltaire attaque, c’est le « Tout est bien dans le meilleur des mondes » de Leibniz. Et si Nietzsche s’est, un temps, réclamé de Voltaire, il ne faudrait pas voir en Voltaire quelque chose comme un athée. Voltaire attaque la Bible, les religions révélées, mais jamais le Dieu de ce que l’on appelait alors « la religion naturelle ». Dans l’article « Athéisme » du « Dictionnaire philosophique », il qualifie les athées d’« esprits faibles », que le spectacle du fanatisme conduit à la position excessive et erronée qui consiste à nier un Dieu créateur et ordonnateur. J’ai beaucoup lu Voltaire, et je vous assure que Dieu revient tout le temps sous sa plume, sans la moindre ironie. C’est vraiment le point central de sa pensée. Bien entendu, son Dieu n’a pas grand-chose à voir avec celui de l’Eglise…

      Supprimer
    3. « Si de telles théories sont stimulantes et excitantes, sur le long terme elles ne mènent à rien celui qui y adhère, sinon à la confusion et à la perdition. »

      Je vous rassure, je ne suis attiré par aucune forme de satanisme, qu’il s’agisse de ce qu’on entend couramment par-là, ou de l’individualisme façon LaVey, qui, bien que pertinent contre certains aspects étouffants de la religion, échoue à s’élever au niveau d’une véritable philosophie morale (mais je pourrai dire la même chose de l’individualisme de Stirner, et sans doute aussi de Nietzsche, hélas). J’ai tout au plus une certaine curiosité pour l’art et la mythologie, mais l’occultisme ne me plaît pas plus qu’à vous.

      « Pour Voltaire, vous commettez une grave erreur, si je puis me permettre, si vous voyez de l’ironie ou l’effet d’une conversion de la dernière heure dans l’extrait que j’ai cité. Ces lignes reflètent au contraire la position de toute une vie. »

      Eh bien, c’est que je me suis trompé. J’ai laissé mon hostilité à Voltaire troubler ma perception de ses opinions, et voilà le résultat. Mais il est vrai que Voltaire est plus déiste que chrétien, et que ça m’a induit en erreur. Désolé.

      Supprimer
  5. Oui, c'est du lourd que ce thème difficile, voire tabou et c'est fort par votre argumentation sérieuse avec exemples à l'appui. Comme d'habitude, je vous ai lu avec intérêt, comme les commentaires d'ailleurs, et il y a grande matière à réflexion. Les grandes questions existentielles n'ont pas fini de hanter et chacun y va de ses théories pour tenter de trouver des réponses mais je crois que beaucoup échappent à la perception humaine. J'aime bien la conclusion de votre texte . Je la trouve optimiste et rassurante.

    RépondreSupprimer
  6. Vous restez prudent et vous avez bien raison ! Cette théorie me semble juste dans ses grandes lignes, mais il est vrai qu’elle est loin d’épuiser tout le mystère de l’existence, et c’est tant mieux. Oui, comme vous dites, l’homme cherche, mais il me semble qu’il ne faut pas trop chercher non plus, parfois il vaut mieux se poser, contempler l’ordre du monde et laisser un peu son cerveau au repos… En tout cas il n’y pas de raison de ne pas être optimiste, tous les sages ont dit, comme Socrate, qu’« aucun mal ne peut toucher un homme de bien », et sans aller jusque-là, si la notion de justice a pu germer dans le cerveau des hommes, c’est qu’elle doit bien correspondre à quelque chose…

    Bonne soirée à vous !

    RépondreSupprimer