24 juin 2011

La critique est aisée, l'art est difficile

      L’observateur se sent toujours supérieur à ce qu’il voit, et il n’a pas tort. Il y a en chacun une fonction purement objective de témoin, qui est la même chez tous, et qui ne se trompe jamais. D’où le sentiment de supériorité. Mais si l’on distingue nettement les erreurs des autres, lorsqu’il s’agit de soi-même, ce qui semblait aisé devient beaucoup plus difficile, et l’on se découvre avec surprise maladroit, hésitant, mauvais. C’est le cas pour les interventions orales par exemple, où l’on croit pouvoir faire mieux que les autres orateurs, jusqu’au moment où l’on ouvre la bouche soi-même.
      C’est que la fonction d’action est totalement dissociée de la fonction d’observation. L’une est objective, passive, et toujours parfaite, l’autre doit se construire petit à petit, avec effort. Voilà pourquoi on a beau distinguer ce qui est mauvais, reconnaître ce qui est bon, sans pour autant être capable de le produire soi-même. Pour progresser dans l’action, il faut agir, et tout le savoir du monde, à lui seul, est à cet égard complètement inutile. Il n’y a pas un je unique qui serait médiocre ou brillant, il y a plusieurs fonctions de l’âme, séparées et autonomes, comme nous l’enseignent les sagesses antiques.

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