3 mars 2017

Ontologie du désir

       Jamais personne ne sert à la fois sa passion et son intérêt.

        Jules César, cité dans Salluste, La Conjuration de Catilina.

       Quelle chose étrange que le désir ! Voilà des millénaires, des millions d’années, qu’il exerce son empire sur Terre, et il n’a rien perdu de sa vigueur. Un si long commerce, tant de déboires et de déceptions n’ont en rien entamé son pouvoir, qui reste intact et neuf comme au premier jour. Et comme il parvient à s’insinuer partout ! Aucune parole, aucun geste, aucun souffle n’est nécessaire entre le sujet et l’objet de son désir, une communication invisible s’établit immédiatement entre eux, plus rapide que la pensée, plus infaillible que tout ce que nos sens peuvent nous livrer.
       Et pourtant, malgré tant de prestiges, le désir n’est jamais parvenu à se faire légitimer, il continue de hanter l’ombre et le secret, il reste condamné et clandestin. Comment oublier les avertissements de tous les maîtres des siècles passés ? « Du désir naît la peine, du désir naît la crainte. Qui s’est libéré du désir ignore la peine : d’où lui viendrait la crainte ? » déclare le Bouddha (Dhammapada, 214). La Bhagavad-Gîtâ est tout aussi catégorique : « La vérité est masquée par cet éternel ennemi du sage qui, sous la forme du désir, ô fils de Kuntî, est un feu insatiable » (Bhagavad-Gîtâ, III, 39). Et l’on pourrait aisément trouver des déclarations analogues chez Platon, les Stoïciens, dans la Bible, etc. La question de la nocivité du désir ne se pose donc même pas. Sur ce point la tradition spirituelle est unanime, et nous pouvons donc passer directement à la question suivante : pourquoi le désir est-il nocif ?   
       La chose la plus étonnante en ce qui concerne les objets du désir, c’est leur intermittence. Tandis que les essences réelles telles que la vertu, la justice, le Tao, etc., sont toujours présentes et ont vocation à diriger la vie de chacun, les objets du désir apparaissent de manière imprévisible dans le champ de la conscience, et disparaissent tout aussi inopinément. Mais sans doute n’est-ce pas la là cause de la nocivité du désir, mais bien sa conséquence : illusoires et trompeurs, les objets du désir n’ont pas assez de consistance pour se maintenir dans l’être, et doivent être sans cesse renouvelés. 
       La question demeure donc : pourquoi diable le désir est-il néfaste ? Contraignons-nous à rester bref et allons droit à la réponse : le désir est néfaste car il masque l’intérêt véritable du sujet. Obnubilé par un objet singulier, le sujet perd de vue le monde dans sa globalité. La nature réelle de la situation lui échappe alors, et il chute, comme l’illustre un apologue chinois dans lequel chaque animal, captivé par sa proie, perd de vue son propre prédateur (Tchouang-tseu, 20). En effet, jamais personne ne sert à la fois sa passion et son intérêt. 
       Armons-nous donc de vaillance, et sachons reconnaître, derrière les couleurs si chatoyantes et si variées dont il a su se recouvrir, le visage impitoyable de notre plus ancien, plus fidèle et plus grand ennemi. 

11 commentaires:

  1. Éh bien, cher Laconique, comme à votre habitude c'est une analyse fine et intéressante que vous livrez à vos innombrables lecteurs ! Ça faisait longtemps que vous n'aviez pondu, mais c'est un magnifique œuf d'autruche qui apparaît soudain ici et maintenant : vous vous attaquez rien moins qu'à "notre plus ancien, plus fidèle et plus grand ennemi" pour le mettre en pièces. Tâche pas si simple effectivement, tant "son pouvoir" "reste intact et neuf comme au premier jour".

    Je passe sur votre récapitulatif "des avertissements de tous les maîtres des siècles passés" destinés à nous prémunir contre ce salopard perfide, et chez lesquels sa "nocivité" fait l'unanimité : vous démontrez tout cela parfaitement, avec la justesse, la précision et les qualités linguistiques qui vous caractérisent, aussi serait-ce totalement superfétatoire que j'en rebalance une couche.

    En fait, votre puissance monte crescendo dans votre brillant article, de même que l'intérêt du lecteur, jusqu'à ce que vous nous expliquiez que le désir est "néfaste", parce qu'il obnubile tout notre être, nous empêchant de saisir "le monde dans sa globalité". Approche tout à fait originale ! Cependant, sur ce point, je demande quelques précisions, cher Laconique, car l'apologue chinois dont vous illustrez cette idée a tendance à nous laisser penser que le principal souci réside dans le fait de ne plus apercevoir les dangers qui nous guettent. Est-ce, selon vous, simplement cela, ou bien que le désir nous prive d'une vision de la vie plus vaste, et donc plus sage ?

    Pour ma part, je compléterai votre article, sans grande originalité je l'avoue, en avançant que le piège numéro un des désirs reste quand même qu'ils doivent être "sans cesse renouvelés", puisqu'ils nous entraînent dans une quête effrénée, éternellement recommencée et donc perdue d'avance, dont la conséquence directe et délétère est de nous priver de repos. Tchao la sérénité de l'âme si précieuse aux sages, cher Laconique !
    Puis l'autre problème, à mon sens, c'est que tant qu'on les a pas pleinement assouvis ils nous tenaillent sévère, les bougres, ce qui n'est guère confortable. Alors j'imagine que les "maîtres des siècles passés" évoqués plus haut se sont dits qu'il valait mieux les tuer dès la racine, que ce serait plus simple et qu'on serait moins emmerdé, entreprise louable mais qui peut aussi bien parfois relever de la gageure. Combien de sages la bite droite dans leur robe de bure soulevée comme une tente sur une trique de cheval ? Hum, allez cher Laconique, levez la main ! Coupable, coupable, coupable !!! (je m'étais pourtant juré de rester soft et classe sur cet article)

    Pour finir et revenir à un peu de sérieux, je souhaite prendre le contre-pied de votre idée centrale, soutenir brièvement la thèse selon laquelle le désir est bénéfique, et adopter un angle différent du vôtre en faisant intervenir une science que j'aime bien, la psychologie évolutionniste.
    On pourrait ainsi considérer, cher Laconique, que le désir, quelle que soit la forme qu'il prend dans notre société de surconsommation, est dérivé de l'instinct de survie, au même titre que la peur par exemple, et qu'il fait donc intégralement partie de la bonne marche de notre organisme et de son rapport au monde. Qu'en pensez-vous, cher Laconique ? Bon, dans cette hypothèse, sans doute faudrait-il également étudier dans quelle mesure le désir en prise avec notre société est dévoyé de son rôle positif originel... Putain, on n'en a jamais fini avec ce salaud-là, cher Laconique, c'est vous qui avez raison !!!

    PS : matez l'heure de ce commentaire, cher Laconique. Vous me faites bosser après une semaine harrrrrrassante tard dans la nuit... Je pense que vous culpabilisez et vous avez raison !

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  2. Ah oui, cher Marginal, vous me faites culpabiliser. Il n’y a rien que je déteste tant que de me coucher tard du fait de contraintes extérieures, alors je mesure l’effort que vous avez fourni. En même temps, j’ai quand même diminué mon rythme cette année, il faut le reconnaître…

    En tout cas j’ai apprécié votre commentaire à sa juste valeur. Je dois vous dire que j’ai été surpris : je m’attendais à voir surgir des gifs dans tous les coins avec un tel sujet, et vous vous êtes montré remarquablement sobre. Comme quoi la philo c’est pas si abscons que ça, ça ne vous a pas fait de mal de vous intéresser à Schopenhauer, comme en témoigne votre foisonnant compte Twitter.

    Donc, le désir, vaste question ! Et question à propos de laquelle vous êtes expert. Ou plutôt non, vous ce n’est pas le désir votre spécialité, mais bien le plaisir, que vous prodiguez à foison, cher Marginal. Bon, trêve de flatterie. Vous soulevez des points très pertinents. Vous avez raison, le désir ne nous masque pas seulement les dangers qui nous guettent (et qui sont généralement suscités par ces mêmes désirs), mais il nous masque tous les côtés désintéressés et contemplatifs de la vie. Je n’insiste pas là-dessus, puisque ce sont des traits qui me caractérisent déjà jusqu’à la caricature, comme vous avez sans doute pu le constater.

    Votre analyse des dangers du désir complète la mienne. L’appétit vient en mangeant, dans tous les domaines, et le désir est par nature insatiable effectivement. Couper à la racine est en effet la solution universellement préconisée (il faut dire ce qui est), mais ce qui était facile et vivable dans une grotte du troisième siècle de notre ère l’est moins dans nos villes où la promiscuité règne, et devant nos écrans qui ont pour but de nous conditionner pour faire de nous des consommateurs libidineux et décérébrés. Mais bon, le sujet de mon article n’était pas vraiment « résister ou céder au désir », mais plutôt « qu’est-ce que la nature véritable du désir ? » et « pourquoi-est-il unanimement condamné dans les traditions spirituelles ? ». Quant à ma « bite », cher Marginal, vous comprendrez aisément que ce n’est pas ici le lieu d’en parler, mais je crois que l’auteur de « Belzébuth » ou du « Priape Magnifique » est mal placé pour donner des leçons en la matière…

    Votre analyse du désir comme « bénéfique » car « dérivé de l’instinct de survie » est sans doute biologiquement juste, mais je vous avoue que cet argument me laisse assez froid. La mort aussi est biologiquement bénéfique pour l’espèce, mais du point de vue de l’individu, celui où je me place, l’un comme l’autre représentent plutôt des aliénations. Pourtant j’apprécie votre volonté de réhabiliter le désir en fin de compte. Vous avez raison de tenter de le récupérer. Je vous rejoindrai, mais je me situerai sur un autre plan. A vrai dire, je ne suis pas tout à fait d’accord avec mon article (c’est souvent le cas). Sans désir, il n’y a pas de vie, tout simplement. C’est le sel de l’existence, le carburant dans notre moteur. Mais plutôt que de prétendre étouffer le désir, il faut le cultiver et l’orienter vers des fins dignes de nous, c’est-à-dire vers l’art, la création. Toute la poésie dérive du désir, vous en êtes une brillante illustration, cher Marginal. Sans désir, pas de Virgile, pas de Racine, pas de « Nourritures terrestres » de Gide, pas de « Eyes wide shut ». C’est donc plutôt dans cette direction qu’il faudrait chercher la légitimation du désir, me semble-t-il.

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  3. Ah ben zut alors... Figurez-vous, cher Laconique, que vous avez répondu à notre Marginal national au moment où je m'apprêtais à envoyer mon commentaire. Du coup, avec votre réponse, certains points de mon objection sont devenus parfaitement obsolètes. Lol !

    Bon, quand même, je sais que ça ne répond pas vraiment à votre question, mais je crois que ce qui rend les sages ou les saints dignes des essences réelles qu'ils sont parvenus à atteindre, ce sont les luttes qu'ils ont dû mener contre les assauts du désir terrestre. S'il n'y avait pas ici bas d'adversaire s'opposant absolument aux réalités supérieures, alors celles-ci n'auraient aucun prix. Et plus l'on monte sur le chemin, plus les mains infernales nous tirent par le bas de la robe. Est-ce qu'il n'est pas question de cela, lorsque Jésus est tenté par Satan dans le désert ? Alors, est-ce qu'au fond, les traditions spirituelles ne se trompent-elles pas lorsqu'elles condamnent unanimement le désir ? Et d'ailleurs, vouloir atteindre à la perfection spirituelle, n'est-ce pas déjà un désir ?

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  4. Désolé pour votre commentaire, chère miss Flint, mais je ne crois pas que votre prose eût pu être redondante avec ma réponse de toute façon. Vous auriez dû poster quand même.

    Je vous rejoins tout à fait sur ce que vous dites (et en plus vous l’exprimez fort bien). S’il n’y a pas de lutte, il n’y a pas de mérite, pas d’intérêt à la vie. Mais force est de reconnaître que le christianisme a poussé le masochisme plus loin que personne en occident. La tentation de saint Antoine, Rancé qui a fondé la Trappe, etc., tout cela donne une imagerie un peu lugubre, abondamment exploitée par les adversaires du christianisme. Pour ma part, j’ai été irrémédiablement marqué par le platonisme, et j’ai tendance à penser que le désir doit être surmonté par la contemplation des réalités supérieures plutôt que par une tension extrême de la volonté. D’ailleurs, quand je mets toutes les traditions spirituelles dans le même sac, je commets un abus de langage (j’en suis bien conscient). Toutes n’ont pas la même position. Le bouddhisme est le plus radical contre le désir. Pour beaucoup d’autres, il s’agit de désirer, mais de désirer autre chose que les réalités sensibles. Enfin, on peut considérer que c’est seulement en se plongeant dans le tourbillon du plaisir que l’on accède à un état spirituel supérieur. C’est la position de certaines traditions initiatiques il me semble. Moi je ne suis pas dogmatique, je suis très prêcheur dans mes articles parce que c’est le style littéraire qui me plaît, mais au fond je pense qu’il faut affronter la vie avec ses épines, on n’a pas le choix de toute façon, impossible de s’extraire du monde, il faut tout avaler, le nectar avec la lie.

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  5. Hé bien, cher Laconique, je commençais à désespérer de vous voir ruminer votre thème préféré, mais je constate avec beaucoup de satisfaction qu’au final vous entamez un rapprochement avec une certaine tradition épicuro-spinoziste que j’ai déjà souvent défendu dans ces colonnes ; « plutôt que de prétendre étouffer le désir, il faut le cultiver et l’orienter vers des fins dignes de nous, c’est-à-dire vers l’art, la création », nous voilà enfin d’accord sur quelque chose cher Laconique, vous allez devenir un adepte du Jardin si ça continue comme ça :

    « Il n’est pas possible de mener une vie plaisante qui ne sois pas prudente, belle et juste. D’ailleurs, là où ces vertus ne se trouvent pas, il n’est pas possible de mener une vie plaisante. »
    -Épicure, Sentences vaticanes, 5, in « Les Épicuriens », Pléiade, p.62.

    (Notez aussi que malgré ses aspects chaotiques, le nietzschéisme insiste également sur l’idée que les pulsions, la tension créative de l’individu, doit être soumise à un « dressage », une discipline –ce que Nietzsche nomme « danser dans les chaînes » -on n’est pas du tout dans un hédonisme facile et « cool » comme le laisse croire la caricature onfrayenne…).

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  6. Eh bien, merci pour votre éclairage, cher Johnathan Razorback. Si je comprends bien, vous avez préféré le commentaire à l’article. C’est que je suis toujours dans une démarche dialectique : d’abord on dit ce qu’on pense, et ensuite on fait la critique de ce qu’on vient de dire. Cela vient directement de Platon, tous ses dialogues fonctionnent comme ça, vous voyez que ce n’est pas une si mauvaise influence que ça finalement…

    Oui, je n’ignore pas - je vous lis - que Spinoza fait du désir l’essence de l’homme, j’ai étudié comme tout le monde l’économie des désirs chez Epicure, et l’esthétisme héroïque de Nietzsche n’est pas sans attraits, il faut bien le reconnaître. Certes, une vie sans désirs n’est plus une vie. Mais dans le champ de la subjectivité, le désir est plus souvent un obstacle qu’une force. Il faut le maîtriser, l’orienter. Or, comment appeler celui contre qui on lutte, sinon – un ennemi ?

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    1. @Laconique
      « Comment appeler celui contre qui on lutte, sinon – un ennemi ? »

      Ah ! Très bonne question cher Laconique, vous savez que si vous me lancer sur le thème du conflit, je peux être intarissable…

      Les Grecs, on en reparlera prochainement sur Oratio Obscura, disposaient d’au moins trois notions pour rendre compte du conflit : polemos (la guerre extérieure), stasis (la guerre interne à la cité) et… agôn, ou le conflit accommodé, symbolisé, ritualisé, « non-violent ». Cette notion d’agôn ou de conflit domestiqué est capitale, on la retrouve pour désigner les affrontements judicaires, mais aussi dans la démocratie, régime politique dans laquelle le changement politique est institutionnalisé et n’a donc pas besoin de passer par des révoltes violentes :

      « Une fois que l’on a ainsi distingué entre antagonisme (rapport à l’ennemi) et agonisme (rapport à l’adversaire), on est en mesure de comprendre pourquoi l’affrontement agonal, loin de représenter un danger pour la démocratie, est en réalité sa condition même d’existence. La démocratie ne peut, certes, survivre sans certaines formes de consensus — qui doivent porter sur l’adhésion aux valeurs éthico-politiques qui constituent ses principes de légitimité et sur les institutions où elles s’inscrivent — mais elle doit aussi permettre au conflit de s’exprimer et cela requiert la constitution d’identités collectives autour de positions bien différenciées. Il faut que les citoyens aient vraiment la possibilité de choisir entre de réelles alternatives. » -Chantal Mouffe, "Le libéralisme américain et ses critiques", in Le politique et ses enjeux, La Découverte/Mauss, Paris, 1994, p. 14.

      Par conséquent, « celui contre qui on lutte » n’a pas nécessairement à être un ennemi, car l’ennemi est une catégorie qui ne relève pas de l’agôn, et qui ouvre donc la voie à la destruction complète de l’autre (dans une guerre on peut tuer son ennemi). A l’inverse, on peut vaincre son adversaire, mais pas le détruire (sinon ce n’est pas un adversaire, par définition). Et quant au désir, qui voudrait sincèrement se démembrer soi-même ?

      « Si seulement il y avait des gens mauvais quelque part en train de commettre insidieusement des actes mauvais et s'il suffisait de les isoler et de les détruire. Mais la frontière entre bien et mal traverse le cœur de chaque être humain. Et qui souhaite détruire un morceau de son propre cœur ? » -Alexandre Soljenitsyne.

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    2. Eh bien, je crois que vous avez tout dit, cher Johnathan Razorback. Vous auriez pu aussi citer l’histoire de Rome. Dans son ouvrage sur « Les Causes de la grandeur et de la décadence des Romains », Montesquieu rappelle que la république romaine était dans un état de guerre permanent. Ou Sparte qui avait institutionnalisé le conflit avec les Hilotes. L’adversité nous tire vers le haut, nous amène à nous dépasser. Je connais mieux Rome que les Grecs, et je crois qu’on peut établir un parallèle avec la différence entre « hostis » et « inimicus ».

      Ah ! là là ! quelque part je ne peux pas m’empêcher de me dire que vous êtes le reflet de votre époque. Autrefois les jeunes ne juraient que par « peace and love », et les dix années avilissantes que nous venons de vivre sur le plan politique vont engendrer une génération de Robespierres et de Bakounines (moi y compris). Après les Tarquins vient toujours un Brutus !

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  7. Cher Laconique, toujours cette profondeur des questions essentielles, c'est sans doute une de ces questions qui a poussé l'un de vos amis ( je me suis demandé si ce n'était pas vous) à l'abnégation et au retrait social dans votre billet précédent.Je lis en ce moment un extrait de la somme de Saint Thomas d'Aquin sur la tempérance, j'espère ne pas déformer ses propos si denses en les vulgarisant, mais sa réponse est que rien n'est réellement condamnable, ni le désir , ni le plaisir, c'est seulement l'absence d'équilibre qui les fait basculer dans le manque qui pousse à la mélancolie ou dans l'excès qui entraîne les débordements de la passion au sens de la souffrance.Je renoncerais à beaucoup comme votre ami si j'avais la certitude d'obtenir cet équilibre.

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  8. Vous avez raison chère Orfeenix, la pression des circonstances extérieures m’a poussé à mettre dans mes derniers textes plus d’intensité qu’il ne sied. Il y a beaucoup de moi, pour tout vous avouer, dans la « Lettre d’un ami », mais cela reste de la littérature, de la rêverie, sans réelle incidence sur les actes. Écrire sert aussi à ça, à s’épancher, à remuer ce qu’il y a au plus profond de nous, ce n’est certes pas à vous que je vais l’apprendre.

    Je ne connais pas Thomas d’Aquin (un peu trop systématique et aristotélicien à mon goût), mais ce que vous m’en dites m’a donné à réfléchir. Je me demande toutefois si le fait de parler d’un « désir équilibré » ne relève pas un peu de l’oxymore. Enfin, même si cela n’apparaît pas à première vue, j’ai tenté d’apporter une certaine dimension humoristique à mon texte. Car enfin, que dire d’un texte sur le désir où le mot « femme » n’apparaît pas une seule fois, et où il est remplacé par une périphrase particulièrement disgracieuse, à savoir la locution « objet du désir » ? Je suis un peu coupé du monde, dans ma bulle, mais quand même…

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    1. En tant "qu'objet du désir" j'aime néanmoins beaucoup votre monde.

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