25 avril 2019

Des miracles dans le Nouveau Testament



Pour moi, je crois trop en Dieu pour croire à tant de miracles si peu dignes de lui.
Jean-Jacques Rousseau, La Profession de foi du vicaire savoyard

La question des miracles est assurément l’une des questions les plus épineuses qui touchent la foi chrétienne. Il y a là une pierre d’achoppement, et un paradoxe : les signes manifestés par le Christ pour prouver sa divinité sont précisément un des facteurs principaux d’incrédulité au cours des siècles. Comme l’écrivait Jean-Jacques Rousseau dans La Profession de foi du vicaire savoyard : « En me disant : Croyez tout, on m’empêchait de rien croire. »
La question est sérieuse, et vaut la peine qu’on l’approfondisse. Le sujet est vaste. Je ne traiterai pas ici des miracles matériels attestés chaque jour par l’Église, ni de ceux que l’on a pu observer dans la vie de certains saints comme Jean-Paul II, ni de ceux qui ont eu lieu dans ma propre vie. Je me bornerai dans cet article à l’analyse de l’Écriture, et de l’Écriture seulement.
En un mot : il est selon moi impossible de dissocier la foi chrétienne des miracles, comme Rousseau et tant d’autres ont tenté de le faire. Les miracles ne sont pas à la périphérie de la foi, ils sont à son cœur même, ils constituent la substance de la vie chrétienne. L’ordre physique n’est pas l’ordre dernier. Rien n’est impossible à Dieu.
C’est sur un point en particulier que je voudrais insister. Une vision naïve de la religion, qui est celle des adversaires du christianisme, consiste à représenter le Christ comme un thaumaturge tout puissant, qui, parce qu’il est fils de Dieu, peut marcher sur l’eau, guérir les malades, multiplier les pains, etc. Bref, le Père Noël. Il est facile, dès lors, de tourner la chose en ridicule, et de demander à voir. Mais est-ce vraiment ce que nous disent les textes ? L’enseignement du Nouveau Testament sur les miracles est simple, et unanime chez tous les rédacteurs : ce qui cause le miracle, ce n’est pas l’arbitraire de Dieu, c’est la foi du bénéficiaire. « Ta foi t’a sauvé » est une formule récurrente dans la bouche du Christ. Le Christ répond à des demandes précises : « Fils de David, aie pitié de moi ! » (Luc, 18, 39.) « Si je touche au moins ses vêtements, je serai sauvée » (Marc, 5, 28). Tant que Pierre croit, il marche sur l’eau. Puis, « voyant le vent, il prit peur et commença à couler » (Matthieu, 14, 30). À Nazareth : « Il ne fit pas là beaucoup de miracles, à cause de leur manque de foi » (Matthieu, 13, 58). L’enseignement du Christ est sans ambiguïté : « Si vous avez de la foi gros comme un grain de sénevé, vous direz à cette montagne : Déplace-toi d’ici à là, et elle se déplacera » (Matthieu, 17, 20).
La tendance commune qui consiste à concentrer les miracles sur la personne du Christ, et à le rejeter en bloc – qui est celle du rationalisme moderne – est donc un contresens. Ce n’est pas le Christ qui fait des miracles, ce sont les chrétiens : « Celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que je fais, et il en fera même de plus grandes » (Jean, 14, 12).
Un témoignage très éclairant à cet égard est celui de l’apôtre Paul. Paul est un esprit rabbinique, circonspect, avare en ce qui concerne le merveilleux. Le mot « miracle » figure cinq fois dans le corpus paulinien. Ce n’est jamais pour se référer aux miracles du Christ. C’est toujours pour désigner ceux accomplis par les croyants : « À un autre est donné d’opérer des miracles, à un autre de prophétiser, à un autre de discerner les inspirations ; à l’un, de parler diverses langues mystérieuses ; à l’autre, de les interpréter » (1 Corinthiens, 12, 10). « Les signes auxquels on reconnaît l’apôtre ont été mis en œuvre chez vous : toute cette persévérance, tant de signes, de prodiges, de miracles ! » (2 Corinthiens, 12,12.)
Le lecteur rigoureux de la Bible est donc placé devant une alternative : soit il ne croit pas aux miracles et il rejette tout en bloc (attitude commune) ; soit il prend les textes au sérieux, il s’engage dans un cheminement à la suite du Christ, et dans ce cas il est obligé d’accepter la conséquence suivante : ce n’est pas seulement dans un passé légendaire que sont relégués les miracles, c’est dans le monde d’aujourd’hui, c’est par sa propre main qu’ils doivent s’accomplir. Sinon, ce n’est pas la peine de se déclarer chrétien. Les paroles du Christ envoyant ses disciples en mission doivent donc être prises au pied de la lettre, il n’y a là nulle métaphore, nulle amplification, mais la description précise et concrète de ce que doit être l’action du chrétien dans le monde : « Proclamez que le Royaume des Cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons » (Matthieu, 10, 7).

2 commentaires:

  1. Vous êtes trop une bigote, cher Laconique !

    En fait, si je vous comprends bien, vous êtes en train de nous dire que le Christ, c'est un peu le Tony Robbins de son temps : une espèce de gourou qui pratique la pensée positive.

    Merde alors !

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  2. Je ne sais pas, cher Marginal, je ne fais que citer le texte de la Bible, qui est souvent différent des représentations que la plupart des gens se font…

    Pour le reste, vous n’avez pas tort sur le rôle de la pensée positive, c’est la première phrase du Dhammpada bouddhiste : « La pensée précède toutes choses, elle les gouverne, elle en est la cause. » Mais il y a quand même une grande différence entre Tony Robbins et le Christ. Pas besoin de vous faire un dessin. Qu’est-ce que vous voulez, je kiffe la Bible, comme Victor Hugo, André Gide, Voltaire qui la cite sans arrêt, et bien d’autres.

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